Le 4 mars 2024, le Parlement vote OUI à l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution Française.

Depuis des décennies, l’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) est un sujet de débat et de lutte en France. Le vote favorable du Parlement ce lundi 4 mars 2024, en faveur de l’inscription de ce droit dans la Constitution française, marque un tournant historique dans la reconnaissance et la protection des droits des femmes. Retour sur ce combat législatif et ses implications

L'IVG en France : une réalité traduite par les chiffres

Avortements en 2022
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En 2022, la France a enregistré un nombre au plus haut d’interruptions volontaires de grossesse (IVG), avec 234 253 cas selon les données de la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES) publiées en septembre 2023. Cela représente une augmentation significative de 17 000 par rapport à 2021, après deux années de baisse due à la crise sanitaire, et environ 7 000 de plus qu’en 2019 avant le Covid.

Une étude du ministère de la Santé montre que cette augmentation du nombre d’avortements concerne “toutes les femmes majeures” avec une hausse plus marquée chez les 20-29 ans. 

Jours de délai pour avoir un accès à une IVG
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Le nombre d’avortements par an traduit un besoin croissant de personnel qualifié et d’infrastructures de qualité pour répondre rapidement aux demandes. Selon le dernier rapport de la DREES en 2019, le délai moyen d’accès à une IVG est de 7 jours. En revanche, il peut s’échelonner jusqu’à 11 jours dans 6 des 13 régions métropolitaines. Les seules régions qui passent en dessous de la barre des 6 jours de délai sont l’Occitanie et les Pays de la Loire. 

En 2020, un rapport parlementaire dénonce la persistance d’inégalités au sein même des régions. Ces dernières voient « le nombre de services d’orthogénie (qui pratiquent l’avortement) se réduire avec la fermeture progressive des petites maternités », engendrant ainsi « des inégalités territoriales qui sont difficilement acceptables ». Le tout dans un contexte de désertification médicale qui touche particulièrement les maternités françaises. 

La constitutionnalisation du droit à l'avortement: une étape dans l'histoire de l'IVG

Il y a 40 ans, Simone Veil défendait le droit à l’avortement devant l’Assemblée nationale. L’histoire de l’IVG en France est profondément liée au combat courageux mené par Simone Veil et ses camarades féministes. Le 26 novembre 1974, Simone Veil prend la parole pour défendre la loi légalisant l’IVG. Inconnue du grand public, cette mère de trois enfants, âgée de 47 ans, est ministre de la Santé depuis six mois. C’est le premier dossier que lui a confié le président Valéry Giscard d’Estaing. Une urgence : chaque année, 300 000 femmes avortaient clandestinement au risque d’être condamnée à six mois de prison, et une femme par jour en mourait.

Qualifié d’un des discours les plus marquants déclamé l’Assemblée nationale, les mots de Simone Veil ont su convaincre un hémicycle exclusivement masculin. Situation de déséquilibre qu’elle dénonce dans son discours: « Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme, je m’excuse de le faire devant cette Assemblée presque exclusivement composée d’hommes : aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement.

Malgré l’opposition parlementaire farouche qui qualifiait l’IVG d’« euthanasie légale », de « barbarie organisée » rappelant « le nazisme » et les « fours crématoires », la loi est finalement adoptée en 1975. Victoire historique qui sonne l’entrée de Simone Veil dans l’histoire.

Mais l’histoire du droit à l’avortement prend racine dès son interdiction en 1920. Une mobilisation pour les droits reproductifs s’organise à partir de 1961 avec la création du premier planning familial. Portée par des figures comme Gisèle Halimi, Simone de Beauvoir et Catherine Valabregue, l’accès à l’interruption de grossesse est un combat qui se poursuit de nos jours. 

La perspective de constitutionnaliser l’IVG en France alimente un débat enflammé, brassant des considérations morales, légales et politiques. Depuis l’adoption de la loi Veil en 1975 évoquée précédemment, l’IVG est un droit acquis dans le pays. Mais depuis que nos homologues américains ont abrogé le droit constitutionnel américain concernant l’IVG en 2022, l’accès à l’avortement est devenu menacé dans nos démocraties. La situation au sein de l’Union Européenne n’est pas très optimiste. Avec une résurgence des valeurs conservatrices qui, pour la plupart, s’opposent à l’avortement et une baisse de la natalité, l’IVG n’a pas le vent en poupe en Europe…  Dans ce contexte, de nombreux français et françaises se sont mobilisés en faveur des droits de la femme, réclamant ainsi l’inscription de l’IVG dans la Constitution française. 

Le 8 mars 2023: Emmanuel Macron s’engageait en faveur d’une loi constitutionnelle. Lors de son discours en hommage à Gisèle Halimi, le président de la République déclare: « En 2024, la liberté des femmes de recourir à l’IVG sera irréversible ». Cette proposition de loi, révélatrice de nombreux clivages idéologiques, a donné du fil à retordre à nos élus. L’Assemblée nationale vote la loi le 30 janvier, suivi de près par le Sénat, le 28 février 2024. Le vote final se déroule lors du Congrès réunissant le Parlement à Versailles, ce lundi 4 mars où la loi est adoptée à la majorité écrasante de 780 voix pour et 72 contre, soit 92% des suffrages exprimé

Le 8 mars 2024: une date symbolique en l'honneur des femmes et de leurs droits

Le 8 mars 2024, le Garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti scelle le droit à l’IVG dans la Constitution lors d’une cérémonie Place Vendôme. « Le sceau de la République scelle en ce jour un long combat pour la liberté », a salué Emmanuel Macron, présent spécialement pour l’occasion. La date est symbolique: cette journée Internationale des droits de la femme a un comme un goût de victoire pour le peuple français. Cela s’est ressenti dans les manifestation pour le droit de femme. Partout en France, des milliers de militants et militantes se sont rassemblés pour célébrer cette avancée historique.

Le droit à l'avortement: une lutte continue

L’adoption de l’inscription du droit à l’IVG dans la Constitution française le 4 mars 2024 marque donc une étape significative dans la reconnaissance et la protection des droits des femmes en France. C’est une victoire pour le droit à disposer de son propre corps et pour l’autonomie des femmes dans leurs choix de santé.

Toutefois, cette avancée ne doit pas être considérée comme un point final, mais plutôt comme un point de départ pour poursuivre la lutte en faveur de l’égalité des genres et de l’accès à des services de santé reproductive de qualité pour toutes les femmes, sans discrimination ni stigmatisation. Le chef de l’Etat français, Emmanuel Macron, envisage d’ailleurs d’inscrire le droit à l’IVG dans la Chartre des Droits Fondamentaux Européens. « Au-delà de l’Europe, nous nous battrons pour que ce droit devienne universel et effectif et nous mènerons ce combat toutes les femmes » a-t-il ajouté lors de sa prise de parole à la cérémonie de la constitutionnalisation de l’IVG, Place Vendôme, le 8 mars 2024. 

Dix femmes, dix destins, mais une même quête d’égalité.

En célébrant ces dix femmes qui ont contribué à façonner notre monde, rendons hommage à leur courage et à leur détermination qui ont ouvert la voie à un avenir plus juste pour tous.

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