Avec le décès de Robert Badinter, le 9 février 2024, la France perd non seulement un grand homme d’État mais aussi un symbole de la lutte contre la peine de mort. Ce deuil national ouvre la porte à une réflexion profonde sur les valeurs qui sous-tendent notre société.
La peine de mort en France
La peine de mort a été exécutée en France jusqu’en 1981. Avant cette date, il y avait de moins en moins d’exécution en France, la dernière ayant eu lieu en 1977. Mais en 1981, lorsque le gouvernement accepte l’abolition de la peine de mort, plus de 50% de la population était pour son maintien. L’opinion de la population française sur le maintien de la peine de mort n’a jamais été très stable. Avant son abolition, il y avait plus de personnes pour l’abolition, mais lors du vote en 1981 60% de la population était pour le maintien de la peine de mort. Même après les gens était toujours pour la remise en place de la peine de mort. C’est pourquoi entre 1984 et 1993, il y a eu 19 propositions de loi visant à rétablir la peine de mort pour certains crimes. À la fin des années 1990, il y a un retournement de l’opinion publique. Pour la première fois en 1998, dans un sondage IPSOS, le pourcentage de français défavorable à la peine de mort (54%) dépasse ceux en faveur de son rétablissement (44%). Il y a de moins en moins de personnes pour la peine de mort. Puis dans les années 2000, il y a une augmentation des personnes en faveur de la peine de mort, même si elle reste minoritaire. Mais depuis ces dernières années la population est de plus en plus mitigée. Presque la moitié de la population est pour la peine de mort. On constate qu’en 2015, 51% de la population française était pour la remise en place de la peine de mort et 51% en 2018. Ces dates ne sont pas anodines, elles correspondent aux attentats qu’il y a eus en France. Pour certains français, la peine de mort serait la réponse à l’acte d’extrême violence qu’est le terrorisme.
Malgré une scission de l’opinion publique sur la peine de mort, le discours de Robert Badinter le 17 septembre 1981 devant l’Assemblée nationale restera un discours historique. Robert Badinter a fait un plaidoyer d’une heure et demi pour inciter les députés à voter pour l’abolition de la peine de mort. Cela a eu un véritable impact comme le montre le résultat avec 363 voix « pour » et 117 « contre ». Avec ce discours et ce vote, la France devient le 35ème pays au monde et le dernier pays d’Europe occidentale à abolir la peine de mort.
Et aux États-Unis ?
La question de la peine de mort aux États-Unis est historiquement chargée et complexe. Son introduction en Virginie en 1608 marque le début d’une pratique qui a perduré sans interruption jusqu’à ce qu’un moratoire national sur les exécutions soit décrété en 1963. Ce moratoire a été levé en 1976, et dès l’année suivante, Gary Gilmore est devenu le premier condamné à mort exécuté depuis la reprise des exécutions.
Les États-Unis jouent un rôle crucial dans le débat mondial sur la peine de mort pour plusieurs raisons. Premièrement, ils demeurent l’un des rares pays développés et démocratiques à maintenir cette pratique, ce qui les place en décalage avec la tendance abolitionniste mondiale. Deuxièmement, il existe une grande disparité dans l’application de la peine de mort à travers les États, certains l’ayant abolie tandis que d’autres continuent à l’appliquer, reflétant ainsi une diversité d’opinions politiques et culturelles au sein du pays. En outre, les États-Unis se retrouvent souvent au cœur des discussions internationales sur les droits de l’homme et la justice pénale en raison de leur influence mondiale. Les débats sur la peine de mort aux États-Unis ont un impact significatif sur les politiques et les perceptions à l’échelle mondiale, notamment en ce qui concerne les questions d’équité raciale, les erreurs judiciaires et l’efficacité de la peine capitale en tant que moyen de dissuasion.
Ainsi, l’histoire de la peine de mort aux États-Unis revêt une importance cruciale pour comprendre les enjeux présents et futurs de cette pratique controversée, tant au niveau national qu’international.
Dans le monde
Comme mentionné précédemment, selon un rapport d’Amnesty International, une augmentation de 20% des exécutions a été observée. Ces données ne prennent pas en compte les milliers de personnes qui auraient été exécutées en Chine, où de telles informations sont classées secret d’État, ni les chiffres de la Corée du Nord et du Viêt-Nam, en raison du manque d’accès à des informations indépendantes. Cette augmentation suggère un renversement de la tendance à la baisse observée au cours de la dernière décennie.
La Chine reste en tête du classement en termes de condamnations, avec environ 2000 condamnés, bien que les chiffres exacts demeurent inconnus en raison de leur classification comme secret d’État. Ensuite, l’Iran enregistre au moins 246 exécutions, le chiffre le plus élevé depuis 2017, tandis que l’Égypte a vu une augmentation significative des condamnations à mort, avec au moins 300 personnes condamnées, représentant une hausse de 34 % et le nombre le plus élevé recensé dans le monde pour cette année. Les États-Unis continuent de jouer un rôle clé dans l’utilisation de la peine de mort, bien que leur nombre d’exécutions soit relativement faible par rapport aux pays leaders mondiaux, avec environ 2600 condamnations.
Dans un monde où la justice prend de multiples visages, la cartographie des méthodes d’exécution révèle une mosaïque complexe de pratiques légales et de débats éthiques.Cet article plonge dans l’abîme des pratiques d’exécution, des chambres à gaz aux pelotons d’exécution, en passant par l’injection létale et la décapitation. Chaque méthode d’exécution, ancrée dans son contexte culturel et historique, soulève un débat profond.
À l’échelle mondiale, la tendance est à l’abolition, la majorité des pays ayant renoncé à cette pratique. Cependant, certains pays continuent de l’appliquer, alimentant ainsi des débats intenses, notamment dans les régions où elle demeure en vigueur. En 2021, Amnesty International a recensé 579 exécutions dans 18 pays, marquant une augmentation par rapport à l’année précédente, bien que le nombre demeure parmi les plus bas depuis 2010. En 2022, une augmentation significative des exécutions a été observée, principalement dans des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.
L’avenir de la peine de mort demeure incertain, avec des forces divergentes à l’œuvre. D’un côté, une pression internationale croissante en faveur de son abolition, et de l’autre, une persistance de son utilisation dans certaines parties du monde. Cette question reste donc un sujet de débat public et de politique internationale ardent.
Maelle MARTIN et Pauline DOHOLLOU